dimanche 28 février 2010

A l'autre bout du monde

Pendant que la tempête fait rage dans l'Hexagone, voici...

Rameswaram, 22 au 24 février

Bon, ceci est un brouillon car j'ai pas vraiment le temps de faire mieux, je le reprendrai donc dans la semaine:

En gros, après la foule des temples, Rameswaram, presqu'île au Sud Est de l'Inde et face au Sri Lanka, fut un havre de paix: eau cristalline avec rapaces planant dans le ciel, plages désertes et évidemment, au coeur de la cité, le temple (sans temple l'Inde n'est point !)
Alors, pour la petite histoire: temple érigé en l'honneur de Shiva (encore lui !) pour le remercier d'avoir aidé Rama à sauver Sita des griffes de Ravana, au Sri Lanka (simple, comme toujours). Le matin très tôt, les indiens s'y rendent en pélerinage (c'est le Varanasi du sud) pour accéder à l'eau des 22 puits sacrés (les couloirs de ce temple sont les plus longs d'Inde, plus de 200 mètres !) Ca se résume surtout à la joie des godets d'eau sur la tête en famille:



Ca se résume aussi à une musique tonitruante à 4h30 du mat (à laquelle j'ai échappé, mon hôtel étant assez éloigné).
Hôtel cool d'ailleurs, hormis quelques fourmis qui tenaient absolument à dormir avec moi !

Le village en lui-même est super mignon: façades colorées, gens adorables, et le coup de foudre de ma vie, Valli, une ptite de 2 ans avec un charisme de top model (enfin si l'on exclut les sacs d'os) ou disons, un charisme de Natalie Portman.




Valli:


Je me suis baladée dans un village de pêcheurs, à ma gauche, des vaches dans les ordures, à ma droite la plus belle plage du monde.





J'ai rencontré un pêcheur, qui m'a invitée à manger du poisson le lendemain midi. (Et oui, comme c'est une ville sainte, tous les restos autour du temple sont strictement végétariens, dans une ville pourtant entourée par la mer !) donc j'ai dit ok avec enthousiasme.
Le lendemain je suis allée me baigner à l'arrache dans le même coin, ne sachant pas où je pourrais bien abandonner mon passeport et tutti quanti (aux dernières nouvelles ils font pas des passeports water proof), mais un indien sympa m'a proposée de les mettre dans son bateau et de me baigner avec lui et ses potes dont une fille, toute habillée: je me suis donc changée pour passer du T shirt pantalon au...T shirt jupe longue (toujours pas de 2 pièces en Inde !) et ils m'ont filé un masque pour faire du snorkelling: bon, l'eau au plus profond m'arrivait aux genoux qui ont sérieusement été entaillés par les coraux, coraux n'abritant pas plus de poissons colorés que la Tour Eiffel, mais c'était quand même sympa car la mer était magnifique et y'avaient pas de touristes ! Voyez que je porte aussi la moustache, je me suis convertie (marques noires du masque...) et comme je parais contente à l'idée d'être entourée par le bras d'un teenager de plus en manque d'occidentale !




Après j'ai mangé un délicieux poiscaille chez le pêcheur, qui n'était autre que le cousin du mec au bateau, mais j'ai mangé seule ! il avait déjeuné peu de temps auparavant, et sa mère aussi, du coup elle m'a servi dehors sur un...sommier de lit en guise de table, et il m'a regardée me dépatouiller de mon poisson riz sauce avec les doigts: poisson à la chair très compacte, goûtue, qu'il appelait "ooli", impossible de savoir ce que c'est !

J'ai été visité un autre temple (je deviens accroc, une journée sans temple et mon monde s'écroule), je prends un tuk tuk car j'étais naze, alors que j'aurais pu y aller à pied: ayant peur de pas pouvoir revenir, je négocie l'aller retour: une belle connerie ! j'ai dit au chauffeur de m'attendre 1 demie heure le temps que je visite, mais je savais pas que la vue sur l'île me donnerait envie d'y passer la nuit (surtout qu'au moment où je suis arrivée, seul un singe me tenait compagnie, assis tranquille sur le rebord, admirant le panorama).
Résultat, après 30 minutes montre en main, le chauffeur est venue me chercher par la peau euh... de ce que vous voulez, genre Cendrillon à minuit, et comme il m'avait déjà attendue, impossible de laisser tomber et d'en prendre un autre plus tard !



Le lendemain j'ai fait la fameuse "balade du bout du monde" à Danushkodi, une langue de sable totalement isolée de tout, où l'océan indien fait coucou à la mer du Bengale. On y accède en attendant un bus pendant une heure près du temple et arrivés dans un village, on doit prendre un pick up qui lui est apte à rouler dans le sable.
Il faut attendre qu'on soit 20 pour qu'il démarre, me demandez pas comment on tient à 20, disons que sur le toit y'a aussi moyen de mettre des gens.
Comme on était que 16, j'ai pu suivre d'âpres négos en tamoul et pour un tarif un peu supérieur à la normale on a embarqué pour Adam's bridge (nul pont, il s'agit juste d'un amas de rochers et de bancs de sable, qui seraient les restes du "pont" construit par Hanuman pour aider Rama à aller au Sri Lanka sauver sa femme Sita de Ravana etc...)
Ambiance vraiment bout de l'univers avec le sable et la mer à 360 degrés...
Mais même délire que pour le temple de la veille: le pick up était formel, restons donc 20 minutes, ce qui me laissait quelques instants pour aller voir de chaque côté si la mer y était.
En même temps, j'avais pas vraiment envie de rester toute seule abandonnée au soleil cuisant et aux rapaces ! Photos de l'Adam's bridge et du pick up:



Bon, désolée pour la pauvreté de ce message, j'en profite pour vous dire de ne pas hésiter à laisser des commentaires, histoire que je puisse avoir l'impression que ce blog est lu ;)
par contre ça peut ne pas marcher...!

mardi 23 février 2010

Sacrés saris !

Trichy, 20 au 21 février

Je ne le sais pas encore, mais en quittant Trichy, j'aurai à l'esprit le même genre de phrases tordantes que l'excellent Bill Bryson, auteur d'un road movie hilarant sur l'Australie ("Nos voisins du dessous").
C'est à dire:
"Il y a 2 raisons de se retrouver à Trichy:
1) Un astéroïde a percuté la Terre et ne reste sur la planète qu'une langue de terre de 3 kilomètres carrés habitables: Trichy.
2) Des gens et un guide pourtant bien intentionnés vous l'ont signalé comme lieu à ne pas manquer, en particulier son temple, un des plus gros complexes religieux d'Inde.

Entre parenthèses, j'ai l'impression que tous les temples sont: "l'un des plus gros complexes religieux d'Inde", et "complexe" fait surtout penser à une galerie marchande. Enfin, vu le nombre de conneries qu'ils vendent dans l'enceinte des temples (poupées moches, cotons tiges...!), ça peut coller.

Bref, en arrivant à Trichy, dans ma tête, j'avais surtout quitté Tanjore (voir plus bas).
Après avoir tourné 10 minutes, j'ai trouvé un hôtel bien sans bestioles, avec même la télé (déjà que je la regarde pas en France, à part "la nouvelle star"...) et j'ai réussi à trouver direct le bon bus pour là où je voulais aller et à sauter dedans sans être frappée par quiconque (voir billet Tanjore ^^). A Trichy, il y a en effet 2 monuments importants. Le temple ET le fort du rocher. Je peux vous le faire en V.O. mais ça me fait trop penser à un fromage: le rock fort.
Je monte allègrement les 417 marches menant au sommet, et de là, j'admire un panorama sur les toits colorés de Trichy.





Jusque là, tout va bien.
Sauf qu'en redescendant vers l'église, qui tente vachement mal d'imiter celles de Lourdes, je suis passée devant plein de boutiques de saris, et je me suis mise en tête d'en acheter un.
Pourquoi ? c'est vrai, je n'avais déjà plus de place dans mon sac à dos en quittant Paris, ce qui s'est pas arrangé avec toutes les conneries que j'ai ramené de Birmanie (des guêtres de femmes akka, j'ai carrément ramené des guêtres qui sont trop petites pour mes tibias, sans parler des chaussons de bébé...) Bref, en plus du gros sac à dos, j'avais déjà tellement de sacs à trimballer à la main que j'ai dû envoyer un colis de Pondi (contrairement à Shiva j'ai pas assez de bras !)

Alors à peine arrivée à Trichy, acheter un sari !!! Qu'en + je ne remettrai jamais après l'Inde. A moins d'être invitée à une soirée Bollywood, mais quelle est la probabilité, sachant que j'ai déjà raté les 2 seules qui aient eu lieu en un an ?!

Enfin, me voila, inconsciente, dans une boutique aussi grande que les Galeries Lafayette, où des pancartes, au lieu de me guider, me paument fortement: "fancy saris", "silk saris", "cotton/silk saris"...je me repère donc aux couleurs et après 20 minutes, ça y est, j'ai trouvé le sari de ma vie, enfin les 3 derniers prétendants.
Après une demie heure de doutes, c'est lui que je veux. Mais au fait, comment ça marche, un sari ? Détrompez-vous: je ne parle pas encore de comment ça se porte, ça, ce sera une autre paire de manches, ou plutôt, de plis. Non, de quoi ça se compose, déjà ?
Un sari, c'est un peu plus de 6 mètres de tissu de drapage et une blouse assortie (sorte de boléro à manches courtes laissant voir le ventre que j'ai en plus proéminent, décidément, quelle idée, ce sari !)
Bref, je demande donc où est la blouse, là dedans: le vendeur me répond "dedans", en m'indiquant des franges de tissu décousu qui dépassent. Ah, ce que je pensais être une mauvaise finition se trouve être la blouse. Qu'il faut donc découper. Et coudre.
Ha, ha, ha !
Et il s'imagine que moi, qui ne sais même pas repriser une chaussette, je vais me confectionner la blouse de mon sari ? même pas pour 10 000 roupies !
La vie est bien faite, il existe les tailleurs, il existe même un tailleur attaché à ce magasin, que le vendeur appelle. Il me dit ensuite le fameux: "no problem" qui en général annonce les plus grandes catas, et me fait attendre "5 minutes", mais 5 minutes...indiennes.
J'attends donc 10 minutes, 20 minutes, trois quarts d'heure. Le tailleur a dû disparaître dans un autre sari.
Voyant mon air contrarié, il me donne un dépliant expliquant par A + B comment enfiler un sari, avec petits dessins et explications en anglais. Voila qui ajoute à ma confusion et à mon impatience: même le schéma de montage d'un meuble Ikéa est plus clair.
Du coup, je suis partie. Sans le sari. Je précise avoir essayé juste après des blouses toutes faites chez un concurrent: les indiennes doivent toutes faire maxi du 80 A, c'est pas possible ! Ce qui contraste sensiblement avec le nombre de femmes girondes que je croise chaque jour (ben oui, les chapatis à toutes les sauces, futur billet à eux tous seuls et bien huileux, ne font pas que des sirènes !!!)

Bon, demain est un autre jour ! En rentrant, je tombe à la TV sur "la nouvelle star" indienne, "Nokia youth singer", et j'ai honte de le dire, mais ça sauve ma journée: des donzelles prépubères se languissent en tamoul sur je ne sais quelle histoire d'amour avortée, et chantent plus faux que des marmites ("casseroles" me semblait d'un contenant trop modeste). Le pire, c'est que l'une d'elles, qui chante si loin de sa tonalité qu'on l'entend à peine, se fait carrément encenser par le jury et récolte de pures notes. Remarquez, c'est pas pire qu'en France, ça me rappelle Camélia Jordana !

Le lendemain, je me lève aux aurores (comme tous les matins, + à cause du boucan, de la chaleur et de l'absence de rideaux que d'un courage quelconque !), toute excitée à l'idée de découvrir enfin le fameux Srirangam Renganatha temple. Je saute dans le bus numéro 1, le même que la veille (au moins les déplacements sont faciles à Trichy). Mon sens de l'orientation se développe à vitesse grand V, tel un muscle hypertrophié: désormais, quand je sors d'un resto, je suis capable de retrouver la direction par laquelle je suis arrivée. Ca n'a l'air de rien, mais naviguer à vue dans une ville inconnue et grouillante, sauter en marche dans le premier bus venu et arriver à destination, c'est grand !

Surtout que là, je suis partie pour 8 bornes. Et oui, les complexes religieux, c'est comme les centres commerciaux, c'est excentré.
On dépasse le rock fort du jour précédent, et voici le temple, ou du moins son 1er gopuram (tour). Gopuram, mandapam, nandi, annam, je deviens une pro du jargon templier !

Mais je le boycotte pour aller au bout de la rue, paraît que y'a une rivière dans laquelle les enfants sont trempés pour être fortifiés (mieux qu'Actimel).
La rivière Cauvery est sacrée. C'est pas difficile, en Inde, tout ce qui a trait à l'eau, de près ou de loin, est sacré.
C'est donc au bout de la rue. Sacrée rue ! (un peu stupide cette expression car pour le coup en Inde, y'a que les rues qui soient sûres de n'être jamais sacrées, car c'est là que marchent les intouchables). Enfin bref, c'est une très longue rue, pas loin de 800 mètres !
Au bout, un éléphant, quelques mendiants, des panneaux: "danger, sables mouvants", incitant à ne pas franchir les barrières, et...des dizaines de saris franchissant les barrières, pour aller faire trempette dans une eau peut-être sacrée, mais moins pure que des WC.
Je ne compte pas les tas d'immondices et de plastiques qui jonchent les bords de l'eau. Ni les hindous qui pissent debout, directement dans la flotte, là où les vaches sont vigoureusement frottées par leurs propriétaires, ainsi que les enfants par leurs mères !





En remontant jusqu'au temple, je m'arrête dans une boutique réputée de statues de bronze, et j'en achète 2 (ben oui, comme j'ai dit, mon sac est pas assez lourd, alors je me suis dit, du bronze, c'est nickel, si je puis dire...) Elles ne représentent pas Shiva, mais des ptits musiciens tribaux (et très beaux !)

Le vendeur m'offre le chai (thé) et je repars. Il me rattrape à moto pour m'offrir un jus de coco directement dans la noix, bienvenu car il fait 32 degrés.
Il me propose de m'accompagner demain jusqu'à Rameswaram, à 7h de bus de là, pour me "tenir compagnie". Et que je dois pas y voir du mal. Après m'avoir dit qu'il avait une femme et deux gosses. Je sais pas ce qu'ils ont dans la tête ici... une noix ? mais certainement pas de coco, c'est déjà trop gros !

Enfin, le temple: le calvaire commence, et pourtant, on n'est pas chez les chrétiens !
Ce temple est un labyrinthe avec rien de moins que 7 enceintes à franchir et autant de gopurams. Le truc, c'est que pour passer d'un gopuram à l'autre et avancer vers le centre et le sanctuaire (auquel les non hindous n'ont de toute façon pas accès), on doit traverser des rues, perpendiculaires au chemin, et dans laquelle passent des tas de motos furax et autant de bagnoles qui font pas gaffe où elles mettent leurs roues, sans parler de la poussière, de la caillasse, du monde et de la chaleur. Parce qu'à ce stade, je suis déjà pieds nus (obligatoire pour entrer dans le temple).
Et mes chaussures sont à l'entrée, loin derrière !
Mais à force de côtoyer des temples, je crois avoir compris pourquoi les indiens roulent de manière si sauvage: qu'importe d'être écrasés quand on a autant de vies ?! Ils se réincarneront de toute façon !
Tout ça pour que dalle: les mandapam (halls de piliers sculptés) sont introuvables, la vue depuis la terrasse, imprenable (dans le mauvais sens du terme: impossible à prendre...en photo, car pas assez élevée).
Après une expédition sable brûlant pour aller voir un mandapam, il est fermé. Entre les piliers du 4ème gopuram, des indiens font la sieste: (sur la photo voilà un gopuram !)






Je sors de là un poil énervée, d'autant que je galère à trouver un resto où me poser (plus pour trouver de l'ombre que par réelle faim). C'est riz au citron pour tous, parfait !
Je décide de donner une seconde chance à Trichy avec un autre temple. Il est 13h et il n'ouvre qu'à 15h mais je trouverai bien un endroit où prendre un jus de fruit en attendant: quand j'arrive dans la rue dudit temple, pas âme qui vive. Y'a bien un resto avec stand de jus de fruits mais ni fruits ni préposé au kiosque.
Un autre mec vend des jus de fruits mais son mixer est envahi de mouches et d'un coup, j'ai plus soif ! ça tombe bien, l'appareil était de toute façon en panne.
En désespoir de cause, je me réfugie dans un resto, et demande un thé. Le fameux chai qu'on trouve à toute heure et partout: ben ils ont pas. Que le soir !
Y'a pas d'autre solution que de commander un bon chapati, qu'on me sert avec les moultes sauces habituelles, sachant que j'ai déjà mangé et qu'il fait chaud (encore un truc que je pige pas ici, leur régime immuable de pains de farine et de sauces par 35 degrés, sans légumes verts, sans fruits...!!!)

Comme dans les autres restos, le serveur a les yeux rivés sur mon assiette (ou plutôt sur ma feuille de bananier), et se précipite pour rajouter de la sauce dès qu'il en manque un cinquième. En général, ils ont aussi une bonne tendance à resservir du riz dès qu'il commence à en manquer, ce qui induit un cercle vicieux infernal, qui me rappelle le pain / fromage français.

En plus, le moment des repas ne s'éternise pas, on mange uniquement pour se nourrir et on traîne pas à table, comme partout en Asie. Du coup, le gars du resto ne pige pas que je reste assise pour fuir le soleil. Toutes les 5 minutes, il m'a tendu mon addition pour que je paye ! j'ai fini par payer et rester jusqu'à 15h !

Hélas le second temple n'a tenu aucune de ses promesses, hormis une indienne qui m'a initiée à un mantra pour implorer Shiva (que j'ai bien sûr oublié depuis). C'est surtout la présence d'un touriste que je commence à implorer, pour avoir de la compagnie !

Enfin voilà, c'était Trichy !

P.S: pour vous dire à quel point je suis à l'Ouest, je viens seulement d'apprendre que c'étaient les JO à Vancouver ;)

Oh my Shiva !

Me voici à l'autre bout du monde, comme dirait Emily Loizeau, à Rameswaram, sur une presqu'île (d'ailleurs je vois pas pourquoi on dit "presque", c'est une île !) pile en face du Sri Lanka.
Mais je ne vous parlerai pas de Rameswaram aujourd'hui, y'a déjà fort à faire avec Tanjore et Trichy, dans lesquelles je suis passée la semaine dernière.
Un ptit mot quand même de mon état d'esprit: après une semaine seule (manger au resto SEULE avec que des indiens, me taper des heures de bus SEULE avec que des indiens, etc) j'avoue que je commence à saturer un peu...je suis en manque de touristes! heureusement, un anglais m'a sauvée tout à l'heure.
Disons que là je suis au paradis, mais seule, au bout d'un moment, comment dire...on a beau trouver ça beau, ça suffit plus ! disons que j'ai de + en + l'impression de cocher des endroits sur mon guide genre: "ça, c'est fait" plus que de réellement en profiter.
Entre la chaleur, les transports, changer d'hôtel tous les 2 jours, en réalité je ne me repose jamais: je suis toujours aux aguets, qu'on me vole rien, où vais-je aller demain et comment, quel bus prendre, à qui demander, comment me faire comprendre...
je pourrais me poser 4 jours quelque part mais au bout de 2 jours je m'ennuie et j'ai qu'une envie, reprendre la route pour un autre endroit ! au fond, toujours la même hyperactivité qu'à Paris...enfin bon j'attends beaucoup du Kérala !
C'est pas le tout, mais voilà Tanjore !

Tanjore, 18 au 20 février

Après Pondi chérie, j'ai mis le cap, encore en bus, pour Tanjore dite Tanjavur, ce qui fut assez galère au final niveau transports: y'avait un changement de bus à Chidambaram (vous vous en foutez sans doute des noms des villes mais ça fait couleur locale). Arrivée à Tanjore, il a fallu que j'aille jusqu'à la "new bus station" pour prendre un autre bus pour la "old bus station" qui elle n'était pas à 5 bornes du centre-ville mais en plein dedans. Sauf qu'en allant à la "new", on est passés en plein centre, et le bus a pris quelques passagers et en a laissés descendre d'autres,
de manière tout à fait impromptue, et je serais bien descendue aussi s'il s'était effectivement arrêté: le bus ne s'arrête pas, il faut sauter (ou grimper) en marche, et avec mon sac de 10 kilos j'ai pas osé tenter, c'était la gamelle assurée !

Puis de toute façon, le temps que je comprenne qu'on était dans le centre-ville de Tanjore, il était trop tard (et comment comprend-t-on qu'on est dans le centre de telle ville en Inde ? On essaie de capter l'enseigne d'une boutique, sur laquelle est marquée son adresse complète, si on n'a pas de chance, en tamoul, et si on a du bol, en anglais).

Enfin voila, après une galère d'hôtels (tous full) et une marche de 45 minutes en plein soleil, je trouve un hôtel de luxe (propre, avec seulement 2 cafards, mais j'ai le truc avec les cafards, je vaporise de l'anti moustique dans la zone infestée et le lendemain, je compte les morts).

Je repars illico direction le "big temple" (il s'appelle Brihadeeswarar mais on dit aussi big temple, ça facilite les choses), et je m'aperçois que le bus que j'ai quitté à la Old station, chargée comme une mulette pour marcher jusqu'à l'hôtel, va en fait...presque jusqu'à mon hôtel.
Heureusement, le fameux temple rattrape ce mauvais départ, mieux qu'une longue description voici des photos:




Il est dédié à Shiva et donc plein de nandis (le taureau, qui est le véhicule de Shiva). Je pénètre dans le sanctuaire et pour la première fois, me retrouve à devoir faire la queue avec plein d'indiens pour voir un simple lingam fleuri ! (le lingam est la relique de Shiva si j'ai bien compris, qui ressemble à un gros pénis il faut le dire, c'est d'ailleurs le symbole associé), enfin bon je le distingue tout au bout, malgré les 100 personnes devant moi, et au bout d'un quart d'heure, c'est mon tour: sauf que le gardien m'arrête juste avant l'entrée et que le rideau dévoilant l'oeuvre est désormais fermé: devant moi, des hindous sont dans une sorte de zone intermédiaire et attendent. Ca y est, ils rouvrent le rideau, qui révèle le lingam, mais plus que cela, ce sont les hindous qui assurent le spectacle: d'un seul coup, ils joignent tous leurs mains en prière au-dessus de leurs têtes et se mettent à psalmodier en se recueillant. Après, un prêtre passe parmi nous avec des bougies et les fidèles se disputent pour frôler les flammes et se toucher ensuite le front. Enfin, un hindou distribue de la cendre blanche et vu que j'ose pas trop en prendre, (c'est comme l'ostie, je me sens toujours coupable quand on m'en propose), le prêtre m'en tartine d'office entre les 2 yeux. Entre ça et le tanaka birman, je suis barbouillée pour l'hiver !

Temps fort à Tanjore, donc. D'ailleurs, vu le "oh my god" universel et le "oh my Bouddah" réellement utilisé par les birmans,j'ai demandé à un indien si, hindouisme oblige, ils s'exclamaient "oh my Vishnou", ou encore "oh my Krishna", car j'aurais bien poussé une injonction genre: "oh my Shiva" mais à ma grande déception, ça n'est pas dans les moeurs. D'ailleurs, anecdote en passant, j'ai rencontré un américain athée qui avait pour habitude de lancer: "oh your god !" voila qui met tout le monde d'accord, brillante idée !

Le lendemain, j'ai visité un ancien palais (le bien nommé "palace") avec une galerie d'art et tout plein de statues en granit et en bronze, avec une Vénus de Milo indienne (vu qu'il lui manquait un bras), et la tour de l'horloge, qui logeait bizarrement un gigantesque...squelette de baleine !





Quitter Tanjore fut difficile, au premier sens du terme: j'ai dû reprendre un foutu bus pour la New bus station, bus bondé au possible, et je me suis faite engueuler par le contrôleur, qui moulinait de ses bras à qui mieux mieux sans pouvoir m'expliquer si je devais redescendre ou avancer dans le bus (sachant que mon big sac m'interdisait le moindre mouvement de toute façon !) pour faire court, il a fini par me...frapper ! Pour m'inciter à monter plus vite. Bon, ce serait exagéré de dire que j'ai un cocard, mais mes lunettes de soleil ont failli valser et là franchement j'ai bien failli perdre la face (comme on dit ici, quand on s'énerve et qui est trèèès mal vu des indiens) et lui ai hurlé de ne JAMAIS RECOMMENCER un truc pareil espèce de connard ! en fait, quand un indien m'énerve, la plupart du temps, je reste très calme et je lui assène plein d'insultes en bon français et en souriant, comme ça il s'en rend pas compte.
Enfin là pour le coup je crois qu'il s'en foutait tellement que ça n'a rien changé. Il est ptet contrôleur, mais on peut enlever les deux dernières syllabes !
Bouquet final en arrivant, c'était le terminus, et les indiennes se bousculaient toutes pour monter: plus jamais je ne me plaindrai du métro parisien et de ceux qui laissent pas descendre avant de monter. J'ai tout simplement jamais vu ça, même aux heures de pointes, on est hyper civilisés, à côté ! J'en suis arrivée au point où j'ai été obligée de pousser violemment voire de frapper les nanas, et j'y ai presque laissé un bras, c'était ça où je descendais pas.
J'ai sauté dans le bus pour Trichy !

Quelques remarques en vrac (ça fait un peu sac à patates):

A part ça, les tanjoriens sont sympas: encore des milliers de mains à serrer dans les temples, le problème étant que quand on accepte une main, des dizaines d'autres se tendent et qu'au final ça devient fatiguant, on a un peu l'impression d'être Carla en déplacement. Sans compter les nombreux "what's your name where do you come from", parfois ils continuent leur chemin sans même attendre ma réponse, toujours ils s'en tiennent là et me disent "thank you", tout simplement parce que leur anglais limité ne permet pas de poursuivre la conversation, et qui me pousse à me demander à quoi ça rime (ok ils sont contents de savoir que je suis française, and so ???)

Je rencontre quelques touristes qui disent que les indiens sont froids, qu'ils sourient moins qu'en Thaïlande ou qu'ici ou là, mais j'ai envie de dire que comparé au métro parisien (pour le coup), les indiens sourient, qu'en témoigne cette photo, que je me suis même tapé un fou rire dans le temple de Tanjore avec un ptit vieux sans même lui avoir parlé, que quand je demande, ils me désignent toujours le bon bus à prendre (ben oui, dans chaque gare routière y'a 50 bus avec la direction écrite en tamoul, comment croyez-vous que je suis arrivée jusqu'ici sans souci ?!)



Mais dans un autre billet faudra quand même que je vous parle des trucs énervants chez les indiens, j'aborderai entre autres:
-le geste évasif visant à montrer la direction
-la tactique du "no problem" balancé à toutes les sauces, comme les chapatis
-le ni oui ni non dodelinant (le plus drôle)
-leurs réponses aux questions les plus simples

Bon, prêts pour Trichy ? (billet au-dessus)

mercredi 17 février 2010

"Indiennes à l'éléphant" ou "Eléphant à l'indienne" ?

Photo du bas-relief à l'Arjuna's Penance de Mahabalipuram.


Le "vrai" éléphant se nomme Laxmi et garde le temple de Pondi, en pleine ville. Elle bénit ceux qui lui donnent de l'argent en leur touchant la tête de sa trompe. Ensuite, elle part faire du shopping (surtout son cornac...dont on voit les pieds sur la dernière photo)








P.S: le "montage" de la tête de Laxmi et de sa trompe/ses pieds, qui correspondent presque, n'est pas fait exprès !!!

La promenade des français











Pondicherry...chérie ! 15 au 17 février

Le jeu de mots est facile mais c'est la vérité, je kiffe "Pondi" comme on dit ici, et pas seulement parce que depuis 3 jours je me nourris exclusivement de salades, sandwiches baguette et mille-feuilles. J'avais déjà commencé à Mahabalipuram avec les crêpes au nutella. J'ai juste mis l'aventure culinaire en mode pause mais je reprendrai dès demain. C'est un peu bête de venir en Inde pour manger frenchie je l'admets, mais depuis la Birmanie, j'avoue que j'étais lassée (non pas du lassi) mais de manger des nouilles sautées quand j'en avais marre du riz, et de me rabattre sur le basmati quand les nouilles sautées ne me faisaient pas envie ;)
Le clou fut quand même mon déjeuner de ce midi: salade grecque et aubergines sautées à la sauce aux noix pour le prix indécent, pour l'Inde, de 5 euro (faut arrêter là ! d'habitude je m'en tire à l'aise pour 1,50 euro !)
Non, j'aime Pondichery, ville coloniale, j'aime ses rues "du bazar st Laurent", "Romain Rolland" ou encore "Saint-Ange", arborées et pleines de bougainvillers. Avec des roses trémières, on se croirait à l'île de Ré...ou à Nice: sur le front de mer, une véritable Promenade des... français (80% des touristes ici).
Pour m'accompagner dans cet éden jusqu'à hier, Michael, un frenchie, et Ward, un néerlandais étudiant à Dehli, qui malgré le partage d'un "poisson de St Valentin" en terrasse d'un resto bord de mer dimanche soir n'est bel et bien qu'un pote.
Je me suis vraiment marrée avec eux, notamment Ward, du genre à demander aux restaurateurs si leurs plats sont bons, des fois qu'ils répondent "non" !!!

Après un mojito, on a touché le fond du tourisme occidental en Inde et je suis revenue dans le pays proprement dit avec le marché ce matin: un Big Bazar qui porte super bien son nom. C'est plus ou moins le même gigantisme qu'en Birmanie, le bordel en plus, déchets compris. Quant à mes narines, elles ont subi une formidable gradation, de l'étal des poissons jusqu'à celui des fleurs, en passant par les épices. Dommage que les photos ne soient pas odorantes...
Je suis en tout cas désormais sûre d'une chose d'une banalité affligeante: les fleurs sont l'élément le plus beau de la Terre. Sur 200 mètres, des stands entiers de pétales de fleurs colorées rouges, roses, jaunes, oranges pétantes, bleues...ça m'a rappelé le jardin de mon enfance et franchement j'étais bizarrement émue devant toutes ces beautés, vraiment inattendu !

Chaque vendeur me filait une fleur, que j'ai fini par redistribuer aux indiennes dans la rue (celles qui ne vendaient "que" des légumes) Et on a beau dire, un chou n'aura jamais la trempe d'une rose, c'est valable aussi pour les garçons/filles ;)




Enfin voila, à Pondi, des rues calmes, pas un bruit hormis le pouet pouet régulier des 2 roues et rickshaws, faisant allégrement usage de leurs couacs (et en plus d'avoir une odeur, si les photos étaient sonores, vous pourriez entendre en arrière-plan le vacarme des multiples contrevenants passant près du panneau "interdit de klaxonner" ).

D'ailleurs, anecdote du 1er soir: j'ai tout de suite été dingue des klaxons des rickshaws: qu'ont-ils de spécial ? un couinement de canard de bain, ni plus ni moins ! vu qu'il s'agit d'une scène de mon dernier court-métrage, à chaque rickshaw qui passe, c'est à dire toutes les 2 secondes, j'imagine l'acteur principal à poil se viander sur un canard en plastique :D (selon un américain, ça fait aussi le même bruit que quand on appuie sur le cerveau de George Bush).




Du coup, j'ai fini par demander à un chauffeur où je pouvais me procurer ledit klaxon: il a dévissé le sien sous mon nez et m'a demandé 50 roupies (soit moins d'un euro) que je lui ai aussitôt données. Mais comme Michael en voulait un aussi, je lui ai rendu et on lui a demandé l'adresse d'un magasin. Il voulait nous y conduire mais c'était trop compliqué, alors on a laissé tomber: sur ce, il m'a redonné mon billet de 50 roupies dans une main et...son couac dans l'autre main !
et voila comment je me retrouve propriétaire d'un superbe klaxon de Pondi, gratis ! Ce geste m'a vachement touchée (j'arrête parce qu'entre ça et les fleurs vous allez croire que je ne suis que larmes !)
Ce qui est bien c'est que ce klaxon est plurifonctions: éloigner les importuns, héler le serveur (je blague), signaler ma présence pour traverser...et oui, ici, pas plus qu'ailleurs on est en sécurité sur la route(je vous ai pas raconté mais à Kanchipuram j'ai fait du vélo à l'heure de pointe et j'avais l'impression d'être dans Mario Kart, paf une moto qui déboule, une peau de banane, un champignon booster...je suis morte 20 fois !!!)
Enfin voila, même en mode piéton, c'est une joie de traverser, on reste en Inde. En particulier concernant mon hôtel (dans le quartier indien donc): des néons, un lavabo crado et déboitable à l'envi, un lit plus dur qu'un futon qui me fait douter de la présence d'un matelas, sans draps mais pour moins de 2 euro, hein ! Faut quand même signaler que dès 22h et jusqu'à 7h, le couloir entre ma chambre et les toilettes est occupé par le personnel copieusement étalé par terre pour dormir, et que je dois donc les enjamber en nuisette :D

On est en Inde, disais-je, et les vaches sont ptet sacrées, elles n'ont aucun traitement de faveur. Elles mangent dans les poubelles, comme tout le monde ou du moins comme de vulgaires intouchables.

A l'image de ce contraste, plein de panneaux fleurissent à Pondi, comme autant de frangipaniers dont: "Pondicherry, ville immaculée" avec, juste en-dessous, un petit vieux qui dort au milieu des ordures.
A Pondi comme dans toute l'Inde, il me semble que la misère n'est pas moins pénible au soleil...



Demain direction Thanjore (encoooore des temples !) et Trichy dans la foulée.
Je viens + ou moins de décider de terminer le trip à Bombay (autrement appelé Mumbai)et pas Delhi. Dommage, j'aurais bien aimé vous faire le coup du "Dehli motion" sur daily motion (pff).

Et ce billet est dédié au petit Octave, né de la dernière pluie (ou neige ?) Puisses-tu être aussi brillant (et surtout fou) que ton papa !

jeudi 11 février 2010

Indianite aigue

Je suis bien arrivée à Madras très tard mercredi et j'ai été directement plongée dans l'ambiance:
que de complicatioooons ne serait-ce que pour avoir un taxi à l'aéroport ! Ils voulaient tout savoir, limite ma pointure (bon j'exagère peut-être un chouïa).

Rien qu'à l'hôtel je trouvais pas l'entrée qui était en fait sur le côté, avec le chauffeur de taxi on a du réveiller une forme sombre qui pionçait par terre dehors ! c'est pas fini: mon guide disait que le proprio était très chaleureux, vla la litote !
Il m'a prise dans ses bras pour nous immortaliser tous les 2 avec son téléphone portable en photo.
Et le lendemain son collègue m'a serrée dans ses bras pour me dire bonjour !
Il a fait chauffer de l'eau avec un instrument genre résistance, reliée à un fil électrique qui plongeait limite dans l'eau et relié à la prise murale: j'ai vachement pensé à Claude François durant mon ablution !!!

J'ai vite quitté Chennai pour Kanchipuram hier: petite ville à l' ouest de la côte Est (vous suivez ?)
c'est une des 7 villes sacrées de l'Inde et la 2nde ville indienne la plus sainte, directement après Varanasi ! Pourquoi ? Parce que tout comme Bagan était le Ang Kor de la Birmanie, Kanchipuram est le Bagan de l'Inde (vous suivez toujours ?)
Il y a une centaine de temples là-bas, qu'un indien super anglophone et très sympa m'a fait visiter à vélo moyennant rien du tout (il veut apprendre le francais et m'a même parlé de Camille Claudel et de Rodin !) sauf qu'il a fini par m'avouer avoir eu plein de girlfriends europénnes et paraissait un peu trop sûr de lui...

Les U Tin se trouvent partout !!!

Manque de bol, il m'a suivie tout à l'heure jusqu'à Mahabalipuram, villégiature à la mer au bord du golfe du Bengale où je pose enfin mes tongs pour 3 jours, avant Pondicherry. J'ai réussi à le semer plus ou moins !
Bon ne rêvez pas, je suis ptet à la mer, mais hors de question de me baigner, des squales rôdent.
Non en fait c'est surtout que la plage est pas super propre. Ajouté à ça, bien que très touristique, le lieu a quand même son lot d'indiens qui, peu habitués à voir les indiennes se baigner en maillot, reluquent toutes les occidentales en 2 pièces.

Je vais donc surtout profiter de ma halte pour manger du fondant au chocolat, des salades niçoises et, soyons fous, un steak frites (introuvable en Inde à cause des vaches sacrées qu'on trouve VRAIMENT partout, même sur la plage) car y'a pas mal de restos français ici (et malheureusement de français aussi mais j'en fais partie...)

Voila, l'Inde m'inspire, le moins qu'on puisse dire c'est que c'est un peu crevant toute cette agitation, voire étourdissant. Bon ok, en fait, c'est parfaitement soulant :) mais marrant !

mardi 9 février 2010

Le sens de la vie pour 1250 kyatts





Voici le dernier mail birman inévitablement teinté de nostalgie.



Je suis à Yangon, il fait 34 degrés et ils prévoient 37 pour demain, date à laquelle je m’envole pour Madras en passant par la Lorraine (et par Kuala Lumpur, si vous voulez une postcard de Malaisie en passant, c’est le moment !)

Je vous raconte ici le dernier trek à Kengtung, qui vaut son pesant de kyatt !

Je reviens sur la guesthouse nullissime qui m’a quand même faite payer 8 dollars la nuit pour un lit plein de ressorts, de l’eau froide et un ptit dej avec des toasts même pas toastés. Avec Sylvie et Rémi (en fait pardonnn infini, ils n’ont pas 60 mais seulement 50 ans) on avait quand même demandé la veille si on pouvait pas avoir un déj traditionnel genre riz et soupe de nouilles et ils ont dit oui. Évidemment, le matin, ils nous apportent, avec un sourire désarmant, les toasts dégueus, les 2 œufs au plat qui vont faire exploser mon cholestérol (j’en suis à 4 par jour environ) et le beurre rance.

Pas grave, on est là pour trekker, pas pour becqueter !

C’est donc parti pour un trek sur la route de Tachileik, d’où la nécessité de présenter nos passeports et de graisser la papatte d’un fonctionnaire pour passer le check point.

On achète ensuite une balle de chinlon (balle de rotin pour le foot birman, consistant à jongler avec les pieds) et un planisphère pour une école et on grimpe pendant 2h ds la montagne : car en haut nous attendent les 4 petits villages d’irréductibles akkas qui ne se sont toujours pas faits coloniser ni civiliser, tant qu’à faire. J’ai l’impression d’arriver dans le village d’Astérix, tout en bois et perché dans la montagne.

Le premier village paraît désert. Mawhtoo nous signale pourtant un mariage, et en effet un haut parleur diffuse en live des chants tradis entonnés par les anciens du village (entre nous, ça s’apparente plutôt à des prières musulmanes et ça casse les tympans plus qu’aut chose, Claire arrête de te plaindre).

Nous arrivons dans une maison banale, mais à l’intérieur, tadam…




Dans la première pièce, des hommes sont assis autour de mini tables, par terre. En enfilade dans la seconde pièce, on découvre une quinzaine de femmes akkas en tenue tradi (avec des guêtres, des fringues colorées et surtout une lourde coiffe en métal avec des pièces indiennes datant de la colonisation britannique et moultes perles), et bien sûr, les mariés : madame n’a que 15 ans (c’est relativement vieux déjà, au Yémen elles se marient à 6 !)

Le marié a 20 ans (un retraité) : ils semblent super tristes et on se demande qui on enterre : en fait c'est parce que la noce a déjà duré toute la nuit et qu’ils sont passablement nazes !

On est cordialement invités à donner de l’argent aux mariés et le marié nous fait boire un verre d’alcool de riz (groumpf) je veux dire que c'est lui qui tient le verre, au cas où on saurait pas boire ^^. Suite à ca, il nous fait fumer une cigarette. Mais ça ne fait que commencer : tout le monde se met à confectionner des boulettes de riz gluant, car la coutume veut qu’elles soient lancées sur les mariés : jusque là, tout va bien, je me sens limite en France, entre balancer du riz sec en pluie fine et des boulettes de riz gluant, bon.

Sauf qu’on est invités à manger et que, pendant ce temps, la bataille enfle et fait rage entre vieilles femmes akkas en tenue tradi et jeunes ados en tenue occidentale et gel dans les cheveux (on se demande même s’ils sont pas payés pour se donner en spectacle pour les touristes mais nan, c’est véridique, un mariage comme ça ne se déroule que 2 à 3 fois par an selon Mawthoo !)

Bref, on se retrouve vite au milieu d’une véritable…bataille de boules de riz, faut le dire, car certaines font la taille d’une boule de neige à l’aise. C'est une vraie tempête, un blizzard.

On peut garder la comparaison avec Astérix : ils sont fous ces gaulois, ils sont fous ces Akkas !

Je m’en prends plein le bras et j’en ai plein le dos !je riposte, que n’ai-je fait là, c'est le début d’une guerre ouverte entre l’un d’eux et moi ! Soudain, la femme akka est en colère et se met à pleurer : c'est que ses copines l’ont lâchée et qu’elle est toute seule contre les mecs ! Véridique ! Pourtant elle a bien 50 berges !

Heureusement, un autre touriste israélien qui est avec nous utilise un tamis à riz en guise de bouclier et la soutient. C’est la pure folie, les boules de riz valsent de partout dans la maison !

Selon Mauwtoo, l’étape suivante consiste à tartiner de noir le visage des invités, qu’on se le tienne pour dit. En attendant, je tente de me frayer un chemin vers la sortie avant de virer borgne, en pensant: « moi qui craignais la rage des chiens, ce sont plutôt les birmans qui sont enragés, ici ! »

A peine dehors, des gosses se ruent sur moi chacun leur tour en me passant allègrement une mimine pleine de cendres sur la tronche, au bout d’un moment, j’esquive avec grâce, mais me reprend des boules de riz car mon adversaire fétiche me tire dans le dos. Quel match !!!

Le pire est à venir : des ados se mettent à tonitruer des airs pop avec une formation musicale dont le larsen semble constituer le principal instrument.

Mawtoo m’implore de chanter une ritournelle frenchie, j’appelle Sylvie à la rescousse et on se met d’accord sur: « Les Champs-Elysées » (j’ai d’abord pensé à « Ne me quitte pas » mais qui n’est pas forcément des plus indiqué pour un mariage). Comme dirait Uncle Bens, c’est un succès ! on repart ds 2 autres villages qui ne nous réservent pas de surprises de cette envergure mis à part des peaux de chiens (avec la gueule ouverte et la tête) accrochés à l’entrée en guise de porte bonheur (certains akkas sont animistes).



Après avoir distribué les cadeaux à l’école, nous allons dans le dernier village : quatre gosses nous font spontanément l’honneur d’une prestation unique : sous l’autorité indubitable d’une mouflette de 4 ans, ils débitent à la suite et en chœur une dizaine de comptines dans leur langue maternelle et en se trémoussant à qui mieux mieux, dont le fameux : « Head, shoulders knees and toes » repris à la sauce birmane.


Impossible de les arrêter ! On repart en dévalant les collines pendant une bonne heure et demie (excellent pour les genoux) et on mange ds la rue sur des tabourets taille école maternelle une soupe grandiose (chinoise) pour même pas un euro.


Le lendemain, Rémi vient me réveiller avec un miracle suprême : au ptit déj, le riz et la soupe de nouilles sont cette fois servis ! Nous avons été compriiiiis !

Je paume Rémi et Sylvie dans le marché de Kengtung, tant pis (signalons que je les ai retrouvés totalement par hasard au marché de…Yangon ce matin ! et même s’il est vrai que le monde est petit, le marché de Yangon est quand même sacrément grand).

Mauwtoo m’emmène à l’aéroport mais ce gros malin est venu en moto et mon sac est obèse : qu’importe, il le cale entre lui et le guidon et c'est parti pour 15 minutes de moto en amazone derrière lui (comme les birmanes) car suis en jupe et je peux pas faire autrement car à califourchon, avec le vent, ça reviendrait à me mettre à poil ! Il m’emmène gratuitement et veut pas que je le paye (ahhhh les birmans). En revanche, il me demande un paiement en nature derrière le bâtiment de l’immigration (nan je déconne).

J’ai 2 heures d’attente avant mon avion, la grande question étant: « pour aller à Yangon par où vais-je passer cette fois avec cet omnibus ? Je table sur un Kengtung / Yangon avec escale à Singapour, Paris, et enfin Yangon :)

Pendant ce temps, dans la salle d’embarquement, ils nous passent un film, et quel film ! Pendant mes 2h d’attente, j’ai droit aux:« Vacances de Mr Bean » ! Replantons le décor, je suis dans un aéroport de province birman, paumé au milieu des montagnes, et me voilà à regarder Jean Rochefort et Emma de Caunes (ouais ils jouent dans Mr Bean car ça se passe en France) parler français sous-titré birman.

Je vous passe le trajet avec finalement escales à Mandalay et au lac Inlé, et l’arrivée à Yangon, où je me sens « home sweet home » en reprenant mes quartiers à la White house. Dans cette guest house, les gérants sont sacrément sûrs d'eux: on y trouverait le meilleur ptit dej du monde entier. Ils ont de grands panneaux sur la terrasse pour le signaler et ça me fait mourir de rire, genre : « Breakfast is the MORE important meal of the day ! Find it in HERE ! the best breakfast in the world !”

Je dégotte une gargotte et un jeune qui parle anglais me parle des plats: il me désigne des brochettes en disant qu’elles ne contiennent que de la viande, pas d’os (!!!) encore heureux ! je comprends après car il me sert une soupe…d’os ! (ils adorent ça, du bouillon avec de la moelle et des os, mmmmh)

Je m’en tiens à mes nouilles sautées (dire que j’avais commandé une toute petite portion et il se ramène avec une plâtrée de fou, je sais pas ce que j’aurais eu si j’avais rien précisé !)

Le lendemain, ptit dej pantagruélique donc à la White house, avec guacamole, frites, thé, toasts, beignets aux pommes etc etc et je retrouve par hasard…ma famille polonaise (même hôtel y’a 3 semaines à Yangon, à Bagan, recroisés à Mandalay, et ici !) ils me donnent l’adresse de leur café à Cracovie (je suis aussi invitée par une richissime américaine et son pote coiffeur gay qui vivent à San Francisco, c’est quand même cool de voyager héhé).

Je vais maintenant vous parler de mon linge sale (« oh my bouddah » comme il disent très sérieusement ici, je deviens hyper intéressante !) c’est juste pour l’anecdote : je descends mon linge sale à l’hôtel pour qu’ils le lavent. Et pour mon plus grand bonheur, 3 employés (mâles) entreprennent de vider le sac devant tout le monde à la réception, pièce par pièce ! Et ce, alors que j’avais déjà donné une liste du contenu. Avant qu’ils en arrivent aux sous-vêtements, je mets mon veto et suis limite obligée de hurler pour qu’ils arrêtent le massacre :)

S’ensuit une des plus longues journées de ma vie : vous vous rappelez U thin, le birman qui m’avait abordée le premier jour à la pagode pour m’inviter chez lui et peaufiner son anglais (et forcée à manger 3 bols de mohinga ?)

Et ben par politesse, j’ai fait la connerie d’accepter de le revoir à mon retour sur Yangon (il est très sympa hein mais bon on a vite fait le tour :D)

Ça commence très mal. Il m’attend devant l’hôtel depuis déjà 1 heure (« pour être sûr ») alors qu’on avait rendez-vous à 10h et que je suis là à 10h quoi !

On reprend le bus jusque chez son oncle et sa belle-sœur et s’ensuivent 4 heures d’ennui monumental de classe internationale ! La première fois, j’avais réussi à m’occuper en leur montrant ma crème solaire et mon i pod, mais là, il me parle pas ! Et c'est le seul anglophone à bord…il se contente de me regarder m’emmerder en souriant comme ça :). Ils me reproposent de la mohinga (leur soupe baignant dans l’huile avec du poisson) mais le souvenir de la première fois et le ptit déj d’ogresse que je viens de me taper m’en dissuade…(c’est un peu le dilemme : « comment les offenser le moins possible » ! en sachant que « refuser ou vomir, il faut choisir ! »)

Donc U thin me regarde promener mes yeux un peu partout genre salle d’attente de toubib « quand est-ce que je passe ? ». Midi arrive et avec lui son lot de plats : patates + riz (et oui, on se demande s’il ne manque pas un peu de nouilles pour parfaire tout ça), pousses de bambou dégueus, poisson, poulet, et au cas où y’auraient pas assez de protéines, œufs ! j’en peux déjà plu avant de commencer.

U Thin me propose ensuite d’acheter des trucs à manger pour remercier son oncle de son hospitalité (d’autant que la dernière fois il m’a lu l’avenir et autant vous dire qu’avec ce qu’il m’a révélé…ça me donne moyen envie de le remercier ha ha ha.)

A 14h30, je propose qu’on aille voir ailleurs si par hasard on n’y serait pas, d’autant qu’il a un pote moine dans un monastère. Mais avant de partir, j'ai droit à une assiette complète de tomates (crues, pas biennnn), crevettes séchées (beurk) et feuilles non identifiées, et je parviens à échapper à la sentence en montrant mon ventre de femme presque enceinte qui va exploser.

La tante me demande si je pars parce que je m’ennuie. Comme quoi ! Je lui sors mon plus beau (et faux) sourire pour lui répondre que non, pas du tout ! Je m’amuse comme une folle ! C'est vrai quoi, passer 4h entières dans une maison déjà visitée toute une journée un mois auparavant, enfermée avec des gens ne parlant que birman, et ce, alors qu’il me reste que 2 jours à Yangon et qu’il y a tant à visiter ! Faut croire que je parviens à être crédible puisqu’ils me proposent de revenir avant mon départ pour l’Inde. Et ils insistent VRAIMENT. Hemmmmmm comment vous dire ???

Peut-être ! Je vais essayer ! Mais demain, j’ai poney, et mardi j’ai atelier pâte à sel. Mais je doute qu’ils comprennent.

U tin m’emmène ensuite au monastère, où je m’amuse autant que dans la maison sauf que c’est avec un moine, il a 30 ans et enseigne les règles boudddhiques aux petits novices (ça pourrait être intéressant, sauf que je ne peux rien visiter car il a peur que les petits soient excités par ma présence. Le privilège d’être une fille !)

Du coup, il me regarde avec des yeux de merlan frit en ne cessant de me répéter que je suis la première touriste à visiter sa pièce privée et que même s’il en invite d’autres plus tard, il se souviendra toujours de moi. Du coup, je me sens obligée de m'immortaliser avec lui en photo, que je lui enverrai par mail. Le problème, il veut garder contact par mail avec moi (je sais pas comment lui dire que vu que je parle pas birman et lui pas anglais, on risque de galérer un max). Pendant ce temps, U tin entreprend de me masser énergiquement la tête avec ses pouces mais me décoiffe plus qu’il n’est efficace. On doit encore s’arrêter prendre le thé avant d’aller visiter une pagode (encore) avec un Bouddah couché dont la beauté n’a d’égale que ses plantes de pied (long de 70 mètres, et sur ses plantes de pieds sont inscrits les enseignements bouddhiques).


ENFIN nous rejoignons son frère, moine, dans un resto de rue (sur des MINI MINI tabourets) car il est censé me faire visiter son monastère le lendemain (mon projet de méditation qui est entre temps tombé à l’eau, pas le courage !) et comme il vient de passer deux heures dans un bus (birman) pour me voir, je me sens pas trop de le planter là. Jusque très tard, je discute donc bouddhisme avec le moine et U thin, et là, d’un seul coup, U tin me traduit ce que son frère vient de dire : « il vient de me parler du sens de la vie. Veux-tu savoir quel est le sens de la vie ? » Wouahouuuuuu, je veux dire, là en pleine rue on me propose le scoop du siècle, la révélation finale que même en rêve je n’espère plus, et à ce moment-là on nous apporte nos plats (enfin notre écuelle de riz) et U thin s’interrompt en me disant qu’il va manger d’abord.

QUOI ? mais nan !!!! Le suspense est infernal ! Je suis là, attablée avec le mec qui va enfin me révéler ce que j’attends depuis toujours, QUEL EST LE SENS DE LA VIE quoi !!! et je dois attendre que Monsieur U tin mange !!

C’en est trop :)

Bon, U tin m’a suite à ca fait une super blague en me faisant croire qu’il était crevé et allait se coucher et a disparu 20 minutes (super drôle nan ?)

Bon, alors, quel est le sens de la vie ? En fait, je garde cette histoire de sens de la vie pour moi (qui n’est en fait que totalement subjectif et qui va vous casser les noix parce que finalement ça parle de moralité et d’intégrité et de bon cœur, bref, en gros, pour le moine, le sens de la vie, c’est de vivre au pays des bisounours où on serait tous tellement plus heureux !)

Il me demande ensuite quelle est pour moi: « une vie parfaite » et je meurs d’envie de lui répondre : « avoir une Rolex » mais je flaire le piège, genre énigme du sphinx. Alors je réponds un truc du genre: « une vie parfaite est une vie pleine d’imperfections » en étant très fière de mon coup et bingo, il me répond : « nous sommes dans le même bateau » (tant qu’il s’agit pas du bateau Mandalay / Bagan, ça me va !!!)

Je prends enfin congé, bouffée par les moustiques, et hop !

Suite à ça, je dois signaler quand même que U tin m’a retrouvée il y a une heure dans ce cyber café pour me demander de la thune et pour me revoir ce soir, je vous dis pas quel cirque j’ai du pondre pour m’en débarrasser ! Non parce que vous devinerez jamais comment il s'y est pris ! Il s'est pointé discrétos par derrière, m'a planté ses mains sur les yeux à la "coucou c'est moi !" et ça m'a fait autant flipper que si j'avais vu un fantôme. Je l'ai donc sommé de s'en aller. C’est pas un comportement très noble (ou très bouddhique) certes, mais j’en ai vraiment plein le dos, là, et j’ai envie d’être tranquille !
En réalité, c'est pas évident de savoir comment bien se comporter lorsque 2 cultures sont trop différentes. Ca peut paraître vraiment bas, mais je ne peux sauver à moi seule toute la Birmanie, d'autant plus que j'avais vraiment eu le sentiment d'avoir instauré un contact intègre et "gratuit" avec U tin...

Enfin voila, je vous ai encore grillé une heure de taf avec mes conneries à lire pendant 3 plombes, disons que c’est ma ptite contribution à la crise économique !