lundi 26 avril 2010

Courage, la plage...


Gokarna, 31 mars au 10 avril

Comment ça, mon titre est provoc' ? Peut-être un brin, je vous l'accorde.

Faut dire qu'après 9h de trajet dans 3 bus différents et une arrivée en plein cagnard sur un chemin pentu que j'ai pris dans le mauvais sens, j'étais pas dans la meilleure disposition d'esprit qui soit pour affronter la guesthouse dans laquelle j'ai atterri après avoir pris soin de traverser les 600 mètres de plage et d'escalader les rochers assaillis par la marée. (Cette phrase est amputée de toute ponctuation volontairement, afin que vous ressentiez l'essoufflement que j'ai éprouvé à cette occasion).

Ptit point topographique: Gokarna est un village sur la côte Ouest de l'Inde du sud (côte Malabar), toujours dans l'Etat du Karnataka. C'est là qu'est censé se trouver un paradis perdu même pas encore trop squatté par les hippies de Goa, (Goa, l'Etat qui se situe juste au nord).
Gokarna possède une plage, soit-disant un peu dégueu et pleine d'indiens qui ne supportent pas de voir des nanas dont le maillot de bain n'arrive pas aux chevilles. C'est pourquoi la plupart des guesthouses et des nanas en bikini fleurissent sur les 2 plages annexes: Kuddle beach et Om beach. En fait, y'en a même 2 autres, mais vraiment isolées et sans hébergement (Half moon beach et Paradise beach, que je n'ai jamais eu le courage d'aller voir).


Pourquoi avoir choisi Kuddle beach ? Parce qu'après le trip que je venais de me taper et le poids de mon sac, c'était la plage la plus directement accessible. Et pourquoi avoir élu la guesthouse "Uma Garden" à l'autre bout du fin fond de la plage ? Parce que, selon le super conseil d'un voyageur rencontré à Hampi, il s'agissait d'un "petit paradis où tu seras peinarde". J'aurais dû de suite traduire par: "huttes en cours de démontage dans un coin totalement isolé". Hyper pratique pour la fumette, je dis pas, mais à part ça...!
Pour preuve, voici la photo de ce que le gérant m'a d'abord proposé en guise d'hébergement, j'ai eu l'impression étrange d'être à la Comédie Française, dans une de ces pièces de théâtre avec la thématique (au fort potentiel comique) de l'ouverture / fermeture. Ben oui, fin de saison oblige !



Evidemment, si j'avais donné mon aval, ils se seraient empressés de remonter les murs autour. Je me suis vue, écroulée de fatigue par terre à ciel ouvert, pendant que des indiens, le coeur à l'ouvrage, travaillaient à me procurer un toit et à me construire un hébergement décent.
Mais bizarrement, la perspective de m'effondrer au beau milieu d'un chantier ne m'a guère réjouie. J'ai donc choisi un truc en dur avec option: "araignée géante dans la salle de bains".

Je me suis rapidement demandée si j'étais la seule cliente de la guest house, voire de la plage entière.

Heureusement, j'ai vite croisé un danois qui m'a fait visiter les alentours, et en particulier le chemin que je ne manquerais pas d'emprunter s'il m'arrivait de rentrer à la guest après 22h: heure à laquelle la route des rochers est noyée sous les flots.
Telle ne fut pas ma joie quand je découvris l'arnaque: un sentier escarpé tout rocailleux, à partir duquel il ne faudrait pas oublier de bifurquer à un endroit particulier (qui ne se distinguait d'aucun autre) pour retrouver la colline sur laquelle étaient installées les huttes, avec des tas de virages et d'escaliers. J'ai essayé d'imaginer ce que ça pourrait donner à la nuit tombée. Et je me suis empressée d'aller visiter la plage proprement dite, sans oublier ma lampe (merci Clèm !).

La bonne surprise, ça a été de découvrir que la plage de Kuddle beach était peuplée, et donc, en vie. Il y avaient des gens, je n'étais pas la nouvelle Robinsonne en attente de son éventuel Vendredi. Et tant mieux, parce que ai-je oublié de préciser, j'étais coincée à Gokarna pour une bonne dizaine de jours.
Comment peut-on se sentir: "coincé" à la plage, et a fortiori dans un ptit paradis, c'est ce que tout le monde se demande, hein. Ben tout simplement, entre Bombay (mon avion 12 jours plus tard) et Gokarna, j'avais plus grand-chose à voir. J'avais tout vu, tout fait, comme disent les modestes.
Et en plus, j'en avais ma claque, et j'étais naze, et on arrive quand maman ?

Je me suis donc dit qu'une halte de plus d'une semaine à la playa allait me réconcilier avec mes chakras: j'avais pas prévu une telle déconfiture en arrivant, un tel sentiment d'ennui profond en train de germer en moi. Mais comme j'aime les challenges, j'ai fait comme dans: "Questions pour un champion", j'ai clamé: "JE RESTE !" avec pour projet de changer de guest dès le lendemain.

J'en étais au moment où j'ai repéré des gens. Pas la méga fiesta, mais des gens, quoi. Et à manger. Et j'ai remarqué un élément plutôt cool qui allait m'aider à purger ma peine, (outre le cybercafé), un élément qu'on peut d'ailleurs s'étonner de trouver à la plage: la mer. Une étendue d'eau très pressée de m'accueillir dans son giron agité de vagues tièdes (je précise qu'en réalité la mer était brûlante, d'une indécente chaleur, à tel point qu'on n'allait pas se baigner pour se "rafraîchir" mais pour faire un hammam).

Le soir même après manger, j'ai compris ma douleur et le fait de devoir retrouver ma piaule dans ce labyrinthe de sable (ben quoi, une plage c'est tout droit, y'a qu'à longer ? Y'avaient des tas de chiens errants et sûrement enragés partout). Heureusement, j'avais ma lampe (encore merci, Clém) qui m'a empêchée de me planter dans la caillasse du petit chemin et qui m'a aidée à identifier un agresseur canin potentiel: j'étais sur le point d'arriver quand j'ai ouï un aboiement lointain qui se rapprochait dangereusement, jusqu'à ce qu'une forme sombre se jette sur moi (bon là j'exagère, disons, se faufile dans l'ombre en courant et s'arrête à ma hauteur en hurlant). En fait, le clebs m'a juste raccompagnée jusqu'à ma porte, mais quand même, quoi. Ma résolution n'en était que plus ferme: demain, je déménage !

Le jour suivant, j'ai, faute de place ailleurs, emménagé dans une cellule de prison à la Canopy guest house. (Certes plus centrale, mais plus humide que la mer, je me demande pourquoi ils se croient obligés d'aller chercher des noms aussi pompeux pour des endroits aussi crades, pff, "canopée" !!! L'air était tellement vicié qu'on se serait cru partout, sauf à la cime d'un arbre ! ).

Dire que les touristes déferlaient comme les vagues aurait été complètement faux, disons donc qu'à cause de cette pénurie, les guests avaient fermé les unes après les autres et que les seules encore ouvertes attiraient le chaland. Incapable de tenir en place, je suis partie explorer Om beach. Enfin, incapable de rester dans ce cloaque, je n'ai eu d'autre alternative que d'explorer Om beach à l'heure où le soleil faisait son concerto de midi dans le ciel. A peine arrivée, je me suis affalée dans un bar les pieds dans le sable. Oui parce que ça a été la principale activité de mon séjour à Gokarna: en-dehors du fait de changer de guest tous les 3 jours, les journées se ressemblaient pas mal: passer de paillotte en paillotte pour comparer les pizzas et les jus de fruit, surtout entre 10h et 17h. On bougeait avant (de 9h30, heure du réveil, à 10h, puis repos à l'ombre jusqu'à 17h où l'on ressortait du bar pour aller attendre l'heure du dîner dans le seul autre bar ouvert, à 20 mètres).

Vue du principal resto:



Alors, pour la ptite histoire, pourquoi Om beach ? car cette plage a la forme d'un "Om", ce qui nous avance grandement: autrement dit, elle forme un M géant. (Oh, et puis si vous pigez toujours pas après avoir vu la photo, zavez qu'à y aller, je suis pas cartographe, moi !)



Pour résumer ces 10 jours, j'ai rencontré un suisse très cool au prénom non moins cool, Josserand, et une allemande choupinette avec les cheveux très courts et une seule dread très longue, Natty. Ils m'ont trouvée stressée, alors après presque 3 mois de vacances, ça m'a foutu les boules et j'ai commencé à me calmer. C'est à partir du 4ème jour et du 3ème changement de guest que j'ai commencé à me sentir plus zen (comprenez: "mollusque du bulbe").
Oui, à partir du moment où j'ai élu domicile au "Spanish place" ("place" et pas "palace"), mon emploi du temps s'est fixé pour de bon: réveil, baignade ou bien ptit déj puis baignade, glande au resto où j'ai pris le ptit déj, lunch, sieste par terre sur le balcon de mon pilotis, re baignade, resto. Vous comprendrez qu'à ce stade, le questionnement le plus existentiel à part: "combien pèserai-je en rentrant ?" consistait à me demander si j'avais assez d'énergie pour changer un peu et tester le resto d'à côté.

Ma cabane au Canada (enfin, à Gokarna), 1er étage, 2ème maison, porte droite.

Mon balcon et la natte chère à mes siestes:


J'ai quand même fait quelques incursions dans Gokarna le village (pas trop, car il fallait marcher 20 minutes, et sous 38°, on se pose la question). Mais c'était uniquement pour racheter de l'odomos (super crème antimoustique).

Gokarna, le village:


Le "lac" et son lot de victimes, dixit le panneau. Pour info, l'indienne ne prie pas ses noyés, elle venait de remonter les marches et devait sans doute remercier le dieu qui lui avait permis de faire ses ablutions:


Le lac sert aussi de baignoire collective à des habitants chaleureux qui m'ont presque convaincue d'aller faire plouf avec eux dans les bactéries millénaires:




Le village:


Maintenant, en vrac, ce que je retiens de Gokarna:

-Quand j'ai demandé du poisson au resto 2 face à la mer et que le serveur m'a répondue: "c'est pas la saison".

-Les tas d'artistes qui bricolaient sur les tables du resto 1, Ingo l'allemand qui gravait des coques de noix de coco, le couple de frenchies qui sertissaient des pierres en collier, la grappe d'italiens qui fabriquaient qui des sacs, qui des ceintures, et qui vivaient là depuis 4 mois (!)

-Quand j'ai cru aller assister à un boeuf musical dans la "guest house de Jorgo", l'un des italiens, avec Ingo, Giovanni et Natty, et que j'ai laissé mes chaussures dans le resto, pensant aller "pas loin". On a pris un chemin à l'arrière et on a traversé 3 champs (pieds nus et en pleine nuit alors que rôdaient plein de serpents dangereux), qui aurait cru qu'une plage était si large, pour arriver dans une petite maison paumée, seule au milieu de la cambrousse. C'était la maison de Jorgo, qui était carrément proprio. Et en guise de concert, on a eu la fatale guitare, le banjo, et... la flûte traversière. Du coup, après, j'étais aux aguets, m'attendant à voir arriver une harpe et une viole de gambe d'un moment à l'autre. Pour info, j'ai essayé la flûte de Giovanni et j'ai réussi à sortir une note après 35 minutes de violents efforts labiaux. Prouesse que je n'ai jamais réitérée mais peu importe, je l'ai fait ^^.

-Les indiennes qui tous les jours vers 17h traversaient la plage en file indienne, portant de lourds fagots sur leurs têtes.


-Un crabe.



-Le dernier soir, quand Rose m'a dit: "oh tu pars demain...j'espère quand même que t'as nagé avec le plancton ???". Et ben non, j'avais zappé cette activité extraordinaire. Faut dire que je me voyais pas vous raconter: "ouais, vous savez quoi, dans les backwaters j'ai ptet raté les dauphins, mais à Gokarna, j'ai nagé avec le plancton !".

Mais bon, ça a piqué ma curiosité. Du coup, moi qui ai peur des grosses vagues et encore plus quand on les voit pas, je me suis jetée à l'eau à 23h pour apercevoir le plancton et leurs étincelles, leurs paillettes de lumière qui laissent soit-disant des traces de fée Clochette à chaque mouvement qu'on fait dans l'eau. Et en effet, c'était assez magique à 6 dans l'eau en train de se faire rincer par le courant en pleine nuit pour apercevoir des micro-organismes aussi grands que des poux briller par leur présence.
Même si toutes les 5 secondes on entendait un grondement sourd et qu'on devait crier: "WAVE !" et se tenir prêt à plonger pour éviter la vague. Vous m'excuserez, j'ai pas de photo du plancton, question d'étanchéité.

-Les chiens végétariens: affamés et faute de viande, ils allaient jusqu'à quémander nos pancakes au nutella. J'en ai même vu un qui se jetait sur...une salade de chou cru.

-Le massage du visage que je me suis offert pour la fin (4 euro la demie heure, bon...) à la fin, mes joues étaient tellement lisses qu'on aurait dit des fausses. Mais ce qui m'a le plus fait kiffer, dans le massage du visage, c'est... le massage des oreilles. J'ai failli pas le dire pour pas me taper la honte mais franchement, si je l'avoue, c'est pour que vous essayiez entre vous. Ca vaut vraiment le coup, parole. On n'imagine pas le pouvoir du frottement de lobe d'oreille sur l'organisme entier (j'allais pas dire "pouvoir érogène", faut pas abuser non plus).

lundi 19 avril 2010

Vaux, vaches, cochons



Badami et ses potes, 28 au 30 mars


Badami fut la dernière étape "speed", parfaite pour gambader par monts et par vaux, pour partir en excursion dans les villages voisins.
Badami ressemble donc un peu à Hassan: pas en terme de ville moche, sombre et où il est impossible de dénicher un cybercafé ou un resto, mais concernant le type de visites auquel elle donne accès:

Tout comme Hassan ouvrait sur Sravanabelagola, Halebid et Belur, Badami est proche de Aihole (ça se dit "èolé", mais vous pouvez prononcer: "aïoli", ça mange pas de pain), et de Pattadakal, classés au Patrimoine mondial de l'Unesco, donc beaux.

Sans compter que Badami en elle-même était à visiter: un lac artificiel entouré de deux collines de grès rouge.

Sur la première colline, un fort (duquel on avait une vue plongeante sur les toits de la ville), des ruines, et les immanquables singes, aussi envahissants que les pigeons à Paris.
Vue à partir de la colline 2 sur la colline 1 et les ruines:


Les ruines du fort:



Sur la seconde colline, un autre fort (fermé), et surtout 4 grottes creusées dans la roche et sculptées, datant du 9ème siècle et juste extraordinaires (dont une de style jaïn, mais si, vous savez, les hindous qui ont peur de tuer les fourmis ou d'avaler un moustique par erreur).
Vue à partir de la colline 1 sur la colline 2, les toits et les grottes (mais si, l'espèce de trou tout au fond de l'image, dans la roche, c'est une grotte !):


A l'entrée de la première grotte:

Une magnifique croix gammée...ou bien une svastika, empruntée aux indiens par Hitler pour les besoins de sa cause...
L'origine de la svastika par wikipedia: "Le svastika (parfois appelé par abus de langage la svastika au lieu de la croix en forme de svastika) ou tel qu'on le représente la plupart du temps, est un symbole religieux que l'on retrouve de l'Europe à l'Océanie, apparaissant dès l'époque néolithique. On peut le décrire comme une croix composée de quatre potences prenant la forme d'un gamma grec, d'où son autre appellation de croix gammée.

Ce symbole est notamment utilisé en Orient dans la symbolique jaïne, hindoue et bouddhique, en Chine pour symboliser l'éternité".


Lakshmi (à moins que ce ne soit Parvati) et Shiva (ou Vishnou ?) bref, des entités "déiques" et une des positions abracadabrantesques dont elles ont le secret:


L'entrée d'une grotte:
Vous le reconnaissez ? et oui, il s'agit bien de notre ami Gomateshwara, qui était sculpté dans un monolithe à Sravanabelagola ! sauf qu'ici il est riquiqui et il est enfermé dans une grotte jaïne !


Encore un singe en position humaine:

Même chose, en nettement moins classe:



Mais aussi:
Badami, et ses cochons uniques qui s'épanouissent dans les détritus et se nourrissent dans les caniveaux tout-à-l'égout qui bordent les rues:




Badami et ses macaques qui font les clowns dans les arbres (ou qui méditent) au coucher du soleil:

Badami et son marché:


Badami et son lac dans lequel les indiennes font la blanchisserie de leurs machistes de maris. Ici, les ghâts (marches):



Je sais pas, vous, mais moi, j'ai la nette impression qu'elles se défoulent un peu sur leurs draps, nan ? ;) :

Le seul mec présent...pêche. Oui. Il pèche par sa pêche, pourrait-on dire. Ca lui viendrait pas à l'esprit de les aider !



Aihole, ses temples forcément "exceptionnels":


La plus vieille échelle du monde (qu'ils disent...) :


Mais Aihole, c'est surtout un petit village aux habitants particulièrement attachants (au sens premier du terme), voire envahissants: top chrono une demie heure pour se déscotcher des gosses qui ont mendié des "school pen" comme si leur langue était programmée pour ne dire que cela.
Sans parler des vaches, qu'ils ont maltraité et forcé à se lever pour qu'on les prenne en photo (même si on n'en avait pas fait la demande express...) D'ailleurs, les vaches étaient complètement stressées dans ce bled, à peine on les frôlait qu'elles faisaient des saltos. Y'avait décidement un truc pas net !

Michael harcelé avec une vache en arrière-plan (normal si elle est décorée comme une boule de noël, notamment les cornes):


Vache et sa pote l'aigrette:


Une indienne faisant sa lessive (la 5ème roue du carrosse familial ?!)


Tant va la cruche à l'eau...!

Et enfin, second choc après Halebid, l'ensemble monumental de Pattadakal: une dizaine de constructions de formes bien particulières (bombées ou carrées), superbement conservées et du plus bel effet, pour clôre la session "temples en Inde":


Cette fois, il s'agit de la dynastie Chalukya, comme à Aihole d'ailleurs:



Toujours un nandi (taureau véhicule de Shiva), de face, et ses offrandes :


Le même de dos:

Assortis:


Et enfin le "bus" taille lilliputiens qu'on a dû prendre pour repartir (en retrouvant, comme de par hasard, Monique et Gyslaine à l'intérieur !)